Les nations sont invitées à faire de la Conférence des Nations Unies sur les océans un tournant pour la conservation des mers

Nice (France) (AFP) - Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Gutierres, a déclaré lundi que le monde ne pouvait pas laisser les océans les plus profonds « devenir le Far West », à l'ouverture en France d'un sommet mondial sur les mers.

Les dirigeants mondiaux participent à la Conférence des Nations Unies sur les océans à Nice, alors que les nations se disputent sur les règles controversées concernant l'exploitation des fonds marins pour les minéraux essentiels et sur les termes d'un traité mondial sur la pollution plastique.

Le président américain Donald Trump a donné un caractère urgent au débat sur l’exploitation minière en eaux profondes, en accélérant l’exploration américaine dans les eaux internationales et en contournant les efforts mondiaux visant à réglementer ce secteur naissant.

L'Autorité internationale des fonds marins, qui a juridiction sur les fonds marins en dehors des eaux nationales, se réunira en juillet pour discuter d'un code minier mondial visant à réglementer l'exploitation minière dans les profondeurs océaniques.

Gutierres a déclaré qu’il soutenait ces négociations et a appelé à la prudence alors que les pays naviguent dans ces « nouvelles eaux en matière d’exploitation minière des fonds marins ».

« Les profondeurs marines ne peuvent pas devenir le Far West », a-t-il déclaré, sous les applaudissements de l’assemblée plénière.

De nombreux pays s'opposent à l'exploitation minière des fonds marins, et la France espère que d'autres nations, à Nice, se joindront à un moratoire jusqu'à ce que l'on en sache davantage sur les impacts écologiques de cette pratique.

Le président français Emmanuel Macron a déclaré qu’un moratoire sur l’exploitation minière en eaux profondes était « une nécessité internationale ».

« Je pense que c'est une folie de lancer une action économique prédatrice qui va perturber les fonds marins, perturber la biodiversité, la détruire et libérer des puits de carbone irrécupérables – alors que nous n'en savons rien », a déclaré le président français.

Les profondeurs marines, le Groenland et l’Antarctique n’étaient « pas à vendre », a-t-il déclaré dans un discours suivi d’un tonnerre d’applaudissements.

Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a appelé à une « action claire » de la part de l’autorité des fonds marins pour mettre fin à une « course prédatrice » entre les nations à la recherche de minéraux essentiels sur les fonds marins.

« Nous voyons désormais la menace de l'unilatéralisme peser sur l'océan. Nous ne pouvons pas laisser ce qui est arrivé au commerce international arriver à la mer », a-t-il déclaré.

- Vague d'engagements -

E. Macron a déclaré qu'un pacte mondial visant à protéger la vie marine dans les eaux internationales avait reçu suffisamment de soutien pour devenir loi et était « une affaire conclue ».

La France espère que davantage de pays demanderont un moratoire sur l'exploitation minière en eaux profondes

Le traité sur la haute mer conclu en 2023 nécessite la ratification de 60 pays signataires pour entrer en vigueur, ce que la France espérait obtenir avant Nice.

Macron a déclaré qu'environ 50 pays avaient ratifié le traité et que 15 autres s'étaient formellement engagés à les rejoindre.

Cela « nous permet de dire que le traité sur la haute mer sera mis en œuvre », a-t-il déclaré.

D'autres engagements sont attendus lundi à Nice, où une soixantaine de chefs d'Etat et de gouvernement ont rejoint des milliers de chefs d'entreprise, de scientifiques et de militants de la société civile.

Lundi, le Royaume-Uni devrait annoncer une interdiction partielle du chalutage de fond dans la moitié de ses zones marines protégées, plaçant cette méthode de pêche destructrice au cœur de l'ordre du jour du sommet.

Le chalutage de fond consiste à utiliser d'énormes filets de pêche qui draguent sans discernement le fond de l'océan, un processus capturé de manière choquante dans un récent documentaire du naturaliste britannique David Attenborough.

Macron a déclaré samedi que la France limiterait le chalutage dans certaines de ses zones marines protégées, mais a été critiqué par les groupes environnementaux pour ne pas être allé assez loin.

- Des paroles aux actes -

Dimanche, la ministre française de l'Environnement Agnès Pannier-Runacher a laissé entendre que des « annonces importantes » seraient faites à Nice concernant la création de nouvelles aires marines protégées.

Les Samoa ont montré la voie la semaine dernière en annonçant que 30 % de leurs eaux nationales seraient sous protection avec la création de neuf parcs marins.

Seulement 8 % des océans du monde sont destinés à la conservation marine, malgré un objectif mondial convenu visant à atteindre une couverture de 30 % d’ici 2030.

Mais encore moins d’espèces sont considérées comme véritablement protégées, car certains pays n’imposent pratiquement aucune règle sur ce qui est interdit dans les zones marines ou manquent de financement pour faire appliquer les réglementations.

Les nations devront faire face à des appels pour verser les fonds manquants pour la protection des océans.

Les petits États insulaires sont attendus en nombre au sommet pour réclamer de l'argent et un soutien politique pour lutter contre la montée des eaux, les déchets marins et le pillage des stocks de poissons.

Le sommet ne débouchera pas sur un accord juridiquement contraignant à l’issue de celui-ci, contrairement à une COP sur le climat ou à une négociation de traité.

Mais des diplomates et d’autres observateurs ont déclaré que cela pourrait marquer un tournant indispensable dans la conservation mondiale des océans si les dirigeants se montraient à la hauteur de la situation.

« Nous vous disons, si vous êtes sérieux dans votre volonté de protéger l’océan, prouvez-le », a déclaré le président Surangel Whipps Jr de Palau, une nation de basse altitude du Pacifique.

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